Hache toujours, Hasch jamais.

Publié le par julus.over-blog.com

Un peu de longueur, dans la forme et dans le temps que j'ai pris pour écrire tout ça. C'est la haine que j'éprouve pour une certaine catégorie de Parisiens que j'ai exprimée ici.

 


 

Un soir d'automne, vers les premières heures de la journée, une réception se termine. Voilà, enfin la maison peut respirer, elle recrache enfin les invités, cette foule, qu'on admire mais dans laquelle on ne peut se fondre, ressort finalement comme elle est entrée. Le grand tapis rouge de l’entrée laisse, au fond, entrevoir une petite porte qui déverse tout le surplus d’invités. Tu avales, tu ingurgites cette malbouffe, ces liqueurs, jusques à l'explosion, où, tout est alors vomi d'un coup, en une fois. Et oui, tout s’est bien agité, toute la nuit durant, tous les aliments ont été secoués, imbibés, cassés, liquéfiés, mélangés. Alors, ce pavé, gris, brun, se retrouve souillé, sali si tu y cherches une belle latine, tu n’en verras pas une, mais un paquet de vieilles gauloises poilues, à l’odeur fétide des matins passés au café, à lire, à écrire ; l'un s'en va par là, il embarque d’ailleurs avec lui son reste de Cabernot dont, de l’étiquette, il ne reste que la colle mélangée avec les saletés que le sol lui a offert, comme si aujourd’hui c’était son anniversaire, d'autres attendent ce chauffeur qui devrait déjà être là. Ces gens sont vraiment impossibles, impotents, pour quoi sont-ils payés si ce n’est pour ramener chez eux ces débauchés, ces mannequins sans âme, sans pensée personnelle ?

Dernier clope du matin, ça se recoiffe comme ça peut, un dernier baiser, une dernière embrassade au milieu des charognards, qui avant même le retrait des troupes commencent leur horrible besogne. C’est déjà fini, il t’abandonne, tu n’as plus qu’à rentrer, seule, chez toi. Retourne vomir dans les jupons de ta mère qui, depuis tes quatorze ans, n’est que ta pâle copie, du haut de son âge supérieur. L’élève a dépassé le maître. Imagine là le matin : jogging rose, café, chien lilliputien face à son Gulliver de maître lisant le Figaro devant son téléviseur allumé sur la matinale, le télé-achat, le J.T..



Les feuilles écrasées par tous ces pieds trop imprudents, la rue vidée de ces gens trop transparents, le soleil réchauffe doucement ses paupières, il est encore là, lui. Que fait-il ? Que n'est-il enivré de cette folle soirée ? Où est donc ce clinquant corbillard aux cent quarante-quatre chevaux, qui, comme pour les autres, devrait venir ? Il aimerait dorénavant, monter tout au sommet de la bâtisse qui est encore cachée dans son dos, s’y percher et dormir. Il a encore rêvé cette nuit. Rêvé, non, c'était plutôt l'horreur humaine qu'il a vu hier soir. Tu les as vu tous ces pantins endimanchés, et ces filles, Dieu, ces filles, qui viennent comme des princesses et ressortent du piège telles des putains. J'aimerais, moi, leur dire d'arrêter ; qu'une soirée passée à déambuler sur les bords des larmes de Paris est bien plus agréable que de se retrouver dans ce Club des Haschichins sans aucun Poëte. Où est-elle la poésie ? La beauté du geste, sont-ils tous des chasseurs, et est-ce que seul le carnet de chasse conte ? Lui, il est pacifiste et n'aura jamais la faiblesse de volonté de tuer un animal.

Oh, mais oui, il est différent de tout ce tas sorti il y a déjà trop longtemps. Pourquoi porte-t-il des chaussures trouées ? Et ces cheveux, longs, sales, attachés de travers. Non mais, regardez, ces T-shirts, pas un qui ne soit à sa taille, pas un qui ne soit troué, pas un qui ne soit comme celui d’hier.
Tu sais, il n'est pas méchant, il ne se croit d'ailleurs pas si particulier, ça n’est qu’un doux rêveur qui cherche la création et la liberté. Il a beau passer un jour, une semaine, un mois, un an avec ces gens, jamais il ne les connaîtra. Mais tu ne le connais pas ? Tu ne sais pas où le trouver ? Il a bien un nom qui doit cependant rester secret. Ce sera pour nous le cavalier sans cœur.



Dimanche dernier, encore une déception amoureuse. On s’était fait pourtant beaucoup d’espoirs : ils n’arrêtaient pas de passer leurs temps libres ensembles. Elle était belle, il était beau. Tout le monde avait déjà parié sur le nom du premier enfant, d’ailleurs, un consensus avait été finalement trouvé. Ce serait Hadrien pour un garçon et Miaje pour une fille. Tout allait pour eux, de leurs initiales, jusques à leurs goûts contraires. Mais la vie n’est pas si simple. La déception brutale avait été grande, et de pleurs en insultes durant toute une nuit, voire même plus, je n’en sais rien, leur relation avait été détruite comme ça, du jour au lendemain. Il ne lui parlait dorénavant plus, il devait être comme repoussé par quelque aura mystérieuse et menaçante qui lui montrait de quel côté se tourner.

Mais lui, ne le vivait pas si mal, ça n’était, pour cet homme, ce bourreau des cœurs, pour ce terrible ennemi des femmes, qu’une de plus ; en effet, il n’en était pas à sa première destruction sentimentale. Mais contrairement à ceux armés d’un canon, lui n’attaquait pas ses mammifères. Ne souhaitant le mal de personne, il se laissait approcher, par affection, par gentillesse, par cruauté. Mais à un moment, l’animal devient fou, dangereux, agressif, c’est alors, dans cette défense inexorable, pour ce qu’il croit être sa survie, qu’il finit par blesser le gibier. Mais il ne l’achève jamais. Toujours, il laisse fuir la blessée, il ne va jamais la chercher pour lui infliger le coup de grâce. Ainsi, sa vie était-elle ponctuée de découvertes secrètes, de conquêtes rapides, de joies immenses, rayonnantes, de rires incontrôlés et qui n’ont de cesse que lorsqu’on étouffe, puis de batailles sanglantes, de pertes déchirantes, de chagrins inextricables, de pleurs et d’insultes violentes et infamantes.



Bref, passons : marcher, un pied devant l’autre, pour avancer et rentrer. Malgré sa lenteur, personne ne se rappellera qu’il est passé par là. Seul, seuls les écureuils et les cabots l’auront vu passer, doucement, jusques à la Cinquième. Il attrape au vol un de ces bolides rapides comme l’éclair, agiles à la manière des serpents de mers se déplaçant au milieu des navires fendant l’océan, venus pour le déchirer. Ces horreurs marines sont fragiles, sans défense et ne peuvent que céder ou s’engager. Ici, ces monstres abyssaux sont d’or. On s’installe en leur cœur, il suffit de penser, de dire, de rêver sa destination. On s’endort : vous y voilà. Mais si par bonheur, tu te réveilles pendant la traversée des courants, si par hasard, tu aperçois, à travers tes paupières demi-closes, semi-ouvertes, les feux, éclairant la route de la bête, tu sentiras alors à tes autours, des sirènes se faufiler. À chaque fois, c’est une nouvelle vague. Elle manque à chacun de ses assauts de nous renverser, et comble de l’histoire, c’est à nous, ensuite, de veiller à ne pas renverser une vaguelette isolée. Les tensions sont alors oubliées, tous les navires tentent de résister à la marée, mais sitôt retournés en mer, c’est la bataille pour la survie : de partout arrivent, dans le plus grand désordre, des boulets de canons, des harpons, des cadavres. Enfin, après ces longues minutes de supplices, le passager, est libéré, il crache ce qu’il lui restait après cette soirée. Puis exténué par la brutalité de la vie, île, rentre se coucher.

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